
(lavoixdesentreprises.info) – Initialement prévu pour ce mois de juin, l’Agence africaine de notation de crédit (AfCRA), qui envisage de redéfinir le paysage de la notation financière en Afrique et de refléter les réalités économiques du continent en réponse aux critiques des grandes agences internationales, est désormais attendue pour septembre 2025.
L’annonce a été confirmée le 9 juin 2025 : l’Agence africaine de notation de crédit, AfCRA, ne débutera ses activités qu’en septembre 2025. Ce projet, attendu depuis longtemps, répond à un besoin pressant d’adapter la notation financière aux spécificités africaines. Face aux critiques des leaders africains concernant les méthodologies des grandes agences comme Fitch Ratings et Moody’s, AfCRA se présente comme une alternative prometteuse.
Créée pour remédier aux lacunes des notations internationales, l’AfCRA se concentrera sur l’évaluation de la dette en monnaie locale des États, des institutions financières et des entreprises africaines. Sa première notation souveraine est anticipée pour la fin 2025 ou le début 2026, une étape cruciale pour établir sa crédibilité. Misheck Mutize, expert en notation de crédit, souligne que des consultations sont en cours pour nommer le directeur général de l’agence, un poste clé qui devra incarner l’indépendance et l’objectivité de l’AfCRA.
Le projet a été initialement prévu pour un lancement en juin 2025 lors d’une réunion des chefs d’État et de gouvernement, mais le calendrier n’a pas été respecté. Cette situation a suscité des interrogations sur l’engagement des acteurs africains à mener à bien ce projet essentiel. En effet, les critiques envers Fitch Ratings se sont intensifiées récemment, notamment après la dégradation de la note de la Banque africaine d’import-export (Afreximbank). Le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP) a dénoncé des analyses jugées erronées, soulignant un manque de compréhension des réalités financières africaines.
L’AfCRA est conçue pour fournir des notations crédibles et indépendantes, adaptées aux besoins spécifiques des pays africains. Son objectif principal est de réduire la dépendance à l’égard des agences internationales et de donner au continent les outils nécessaires pour évaluer correctement sa solvabilité. Cette initiative est perçue comme une opportunité pour améliorer la représentation de l’Afrique sur les marchés de capitaux, en intégrant des données socio-économiques pertinentes qui ont longtemps été ignorées.
L’agence ne se positionnera pas en remplacement des agences internationales, mais comme un complément indispensable. En se concentrant sur les réalités africaines, l’AfCRA s’efforcera de corriger les biais souvent observés dans les évaluations externes. En effet, des experts comme Stanislas Zézé de Bloomfield ont exprimé des réserves quant à une agence de notation publique, craignant une perte d’indépendance. C’est pourquoi l’AfCRA sera détenue par des acteurs du secteur privé, garantissant ainsi son impartialité.
Actuellement, deux agences de notation sont déjà actives en Afrique : Bloomfield Investment Corporation et Augusto & Co. Cependant, leur portée est limitée et souvent perçue comme insuffisante pour répondre aux défis financiers du continent. En juillet 2024, Moody’s a renforcé sa présence en Afrique en acquérant GCR Ratings, une démarche qui souligne l’intérêt croissant des acteurs internationaux pour le marché africain.
L’AfCRA, soutenue par le MAEP, sera chargée de développer des cadres d’évaluation qui tiendront compte des priorités de développement du continent. Le MAEP, en tant que partenaire stratégique, fournira des conseils en matière de gouvernance et d’expertise technique, garantissant que l’agence s’inscrive dans les objectifs de développement durable de l’Union africaine.
L’AfCRA représente une avancée capitale pour le marché financier africain. Son lancement tant attendu pourrait non seulement transformer la manière dont la dette africaine est perçue à l’international, mais également favoriser un accès plus équitable aux financements. Alors que le continent s’efforce de renforcer sa position sur la scène économique mondiale, l’AfCRA pourrait bien devenir un acteur clé dans cette dynamique, offrant une vision plus équilibrée et authentique du risque africain.
Tressy Chouente