
(lavoixdesentreprises.info) – Dans un contexte économique difficile, la Cameroon Development Corporation (CDC) affiche un bénéfice net de 45,4 milliards FCFA pour l’exercice 2024, grâce à l’annulation d’une dette fiscale et sociale de 59 milliards FCFA. Ce redressement financier soulève des questions sur la viabilité à long terme de l’entreprise et son impact sur le secteur agro-industriel.
L’année 2024 marque un tournant significatif pour la Cameroon Development Corporation (CDC), une entreprise publique entièrement détenue par l’État, spécialisée dans l’agro-industrie. Selon le rapport du commissaire aux comptes Forvis Mazars, la CDC a réalisé un bénéfice net de 45,4 milliards FCFA, un chiffre qui interpelle par sa nature exceptionnelle. En effet, ce résultat positif est principalement le fruit de l’annulation d’une dette fiscale et sociale s’élevant à 59 milliards FCFA, une opération qui soulève autant d’espoir que d’interrogations.
Cette annulation, dont 24,1 milliards FCFA étaient dus à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), a permis de réduire le montant de ces cotisations de 80 % en 2024. Parallèlement, la dette due au personnel, évaluée à 35 milliards FCFA, a également été prise en charge par l’État. Cette démarche a permis à la CDC de redresser ses comptes, affichant un chiffre d’affaires de 23 milliards FCFA, en hausse de 3 milliards FCFA par rapport à 2023, soit une progression de 11 %.
Néanmoins, si les chiffres semblent prometteurs, la réalité de l’activité de la CDC est plus complexe. La valeur ajoutée de l’entreprise a atteint 13 milliards FCFA, en hausse d’un milliard FCFA, mais reste insuffisante pour couvrir des charges de personnel qui s’élèvent à 20,7 milliards FCFA et les amortissements d’équipements. Résultat : l’entreprise a enregistré un résultat d’exploitation négatif de 12 milliards FCFA, soulignant les défis opérationnels auxquels elle fait face.
L’annulation des dettes a non seulement permis d’afficher un bénéfice net, mais a aussi redressé les fonds propres de la CDC, qui étaient négatifs à hauteur de 35 milliards FCFA en 2023. Aujourd’hui, grâce à cette opération, les fonds propres s’élèvent à 9 milliards FCFA, respectant ainsi les exigences de l’article 664 de l’Acte uniforme OHADA. Ce dernier stipule que les fonds propres d’une entreprise ne doivent pas être inférieurs à la moitié de son capital social, fixé à 53 milliards FCFA.
Dans cette dynamique de redressement, la CDC projette une seconde augmentation de capital, d’un montant de 14 milliards FCFA, portant le capital total à 67 milliards FCFA. Cette opération, qui sera effectuée par compensation des dettes fiscales et sociales, est cruciale pour assurer la pérennité de l’entreprise. Lors d’une réunion du Conseil d’administration le 23 janvier 2025 à Yaoundé, la conversion de la dette fiscale de 14 milliards FCFA en fonds propres a été approuvée.
La valeur nominale de chaque action de la CDC est fixée à 10 000 FCFA, ce qui devrait aboutir à l’émission de 1 401 933 nouvelles actions. Cette initiative vise à renforcer la structure financière de l’entreprise tout en rassurant les investisseurs et les parties prenantes sur sa solidité.
Cependant, malgré ces efforts de redressement, des questions demeurent. La CDC, dont l’activité repose principalement sur la culture et la commercialisation de bananes et d’hévéa, doit faire face à des défis structurels. Les charges de personnel, ainsi que les amortissements, pèsent lourdement sur son résultat d’exploitation. De plus, l’annulation des dettes, bien qu’efficace à court terme, pose la question de la durabilité de ce modèle économique à long terme.
En conclusion, la CDC, bien qu’enregistrant un bénéfice net impressionnant en 2024, doit naviguer avec prudence dans un environnement complexe. L’État, en tant qu’unique actionnaire, a un rôle crucial à jouer pour garantir non seulement la viabilité de l’entreprise, mais aussi pour soutenir le développement de l’agro-industrie au Cameroun. Le chemin vers une performance durable est semé d’embûches, et la CDC devra faire preuve d’innovation et de résilience pour surmonter ces défis.
A.B.

