
(lavoixdesentreprises.info) – Le Directeur général de la Société nationale de raffinage (Sonara), Harouna Bako, a annoncé avec satisfaction une victoire juridique contre le trader nigérian Sahara Energy, permettant ainsi à l’entreprise de se soustraire à une lourde amende. Cette décision, rendue par le tribunal britannique, a des implications majeures pour la raffinerie camerounaise, déjà en proie à des difficultés financières.
Le 27 février 2025, Harouna Bako, à la tête de la Sonara, a exprimé sa joie après avoir remporté un procès au tribunal de grande instance de Londres, mettant un terme à un litige complexe avec Sahara Energy. Ce dénouement évite à l’unique raffinerie du Cameroun une condamnation potentiellement dévastatrice d’environ 63,1 milliards FCFA, soit 101 millions de dollars. La décision, rendue en décembre 2024 par la Commercial Court d’Angleterre et du Pays de Galles, a été perçue comme une bouffée d’oxygène pour la Sonara, confrontée à des défis financiers persistants.
Représentée par le cabinet d’avocats Squire Patton Boggs, la Sonara a réussi à contrecarrer les demandes de Sahara Energy, qui avaient d’abord dépassé 85,8 milliards FCFA, avant d’être réduites à 63,1 milliards FCFA au fil du procès. Le trader pétrolier nigérian réclamait des compensations pour des intérêts, des pénalités et des pertes de change liées au retard de paiement pour plusieurs cargaisons de pétrole brut livrées en vertu d’un contrat signé en 2013.
Un des points de divergence majeurs résidait dans l’interprétation d’un « Rapport Commun » issu d’une réunion de conciliation en 2019. Sahara Energy soutenait que ce document était un accord contraignant, lui conférant le droit à des indemnités supplémentaires. Cependant, la juge Sara Cockerill a statué que ce rapport ne pouvait pas être considéré comme un accord juridiquement exécutoire selon la législation anglaise. De plus, les pertes liées aux fluctuations de change ont été jugées trop indirectes pour être récupérables, entraînant la prescription de l’ensemble des réclamations de Sahara.
Le litige trouve son origine dans une série de contrats d’approvisionnement en pétrole brut signés depuis 2013. En raison de difficultés financières, la Sonara n’a pas respecté les délais de paiement, engendrant une série de complications. Les paiements ne commencèrent qu’en 2016, alors que les conditions contractuelles imposaient des règlements dans les quatre mois suivant chaque livraison.
Pour faire face à ses engagements, Sahara Energy avait contracté des lettres de crédit auprès de banques nigérianes, notamment Access Bank et Ecobank, ce qui a accru ses coûts financiers en raison des retards de paiement de la Sonara. En examinant le cas, le tribunal britannique a analysé plusieurs aspects, notamment la responsabilité de la Sonara pour les frais de retard, l’interprétation du rapport de 2019, ainsi que la validité des demandes reconventionnelles de la Sonara.
À l’issue du procès, le tribunal a conclu que les réclamations de Sahara Energy étaient prescrites, n’ayant pas été reconnues par la Sonara. De plus, il a déterminé que le rapport de 2019 ne constituait pas un accord exécutoire et que les pertes de change ne répondaient pas aux critères de prévisibilité. Enfin, le tribunal a souligné que l’article 8 du contrat ne formait pas un cadre complet, exonérant ainsi la Sonara de toute responsabilité pour des pertes imprévues.
Cette victoire judiciaire est d’une importance capitale pour la Sonara, qui lutte déjà contre des difficultés financières exacerbées par un incendie survenu en 2019. En effet, la raffinerie est en quasi-faillite, avec une dette estimée à 1 000 milliards FCFA. La mise en place d’une taxe sur le carburant a permis de rassembler des fonds pour rembourser une partie de cette dette, mais les défis restent considérables.
Le ministre camerounais de l’Eau et de l’Énergie a récemment souligné que la Sonara avait réussi à collecter 353 milliards FCFA grâce à cette taxe, ce qui lui a permis de respecter certaines de ses obligations, notamment envers le trader suisse Trafigura. Ce mécanisme de remboursement, prévu sur dix ans, vise à mobiliser un total de 780 milliards FCFA, mais l’avenir de la Sonara demeure précaire.
A.B.
About The Author
En savoir plus sur La Voix des Entreprises
Subscribe to get the latest posts sent to your email.