
(lavoixdesentreprises.info) – Nonobstant les annulations de décisions, saisies de comptes et montants colossaux en jeu dans l’affaire judiciaire tumultueuse opposant le milliardaire camerounais Baba Danpullo à l’entreprise MTN Cameroun, la justice maintient le statu quo dans ce qui s’apparente dorénavant à une saga judiciaire.
La confrontation judiciaire entre Baba Danpullo, homme d’affaires camerounais, et MTN Cameroun s’est intensifiée, créant une véritable saga médiatique. Le 26 février 2025, un nouvel épisode a vu la Cour d’appel du Littoral annuler une décision du Tribunal de première instance (TPI) de Douala-Bonanjo, qui avait ordonné la saisie des comptes bancaires de MTN dans plusieurs institutions financières, notamment Citibank, Standard Chartered Bank et BICEC. Cette décision annulée aurait permis à MTN d’échapper à une saisie de 144 milliards de FCFA, dont 120 milliards relatifs à son service Mobile Money, protégé par la réglementation de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC).
Cependant, le répit accordé à MTN a été de courte durée. En effet, le même jour, une nouvelle décision judiciaire a annulé celle de la Cour d’appel, rétablissant ainsi l’ordre initial de saisie des comptes. Face à cette situation, un responsable de MTN a choisi de ne pas commenter, déclarant à Sika Finance que l’entreprise n’était pas en mesure de s’exprimer sur ce dossier délicat.
Pour apprécier la complexité de cette affaire, il est essentiel de revenir sur ses origines. En 2020, les biens immobiliers de Baba Danpullo en Afrique du Sud avaient été saisis et liquidés par la First National Bank (FNB). La banque justifiait cette opération par l’insolvabilité présumée de Danpullo, affirmant qu’il n’était plus en mesure de rembourser ses dettes depuis 2019. Baba Danpullo conteste vigoureusement cette accusation, la qualifiant d’« expropriation » et d’« attaque raciste » visant son groupe Bestinver, qui a massivement investi dans le marché immobilier sud-africain.
En réponse à cette situation, Danpullo a décidé de porter l’affaire devant la justice camerounaise pour obtenir compensation. Il a notamment ciblé MTN Cameroun et Chococam, deux entreprises liées à la Public Investment Corporation (PIC), actionnaire de FirstRand Bank, la maison mère de FNB. Danpullo les accuse d’avoir profité de « sommes malicieusement détournées » par FirstRand Bank et exige leur restitution.
Les montants réclamés par Baba Danpullo sont vertigineux. Il évalue à 5 200 milliards de FCFA les actifs perdus en Afrique du Sud en raison des actions de FirstRand Bank. En sus de cette somme, il réclame 21,6 milliards de FCFA pour des loyers indûment perçus, 22,1 milliards de frais de recouvrement, sans oublier des intérêts à un taux de 3,25 %. En somme, le montant total réclamé s’élève à 275,5 milliards de FCFA.
Le 9 juin 2023, un juge des référés avait ordonné à plusieurs banques, dont Afriland First Bank, Ecobank, Société commerciale de banque (SCB), ainsi que la filiale camerounaise de United Bank for Africa (UBA), de transférer au greffier en chef du TPI de Douala-Bonanjo les fonds détenus par MTN. Cependant, cette décision n’a pas été mise en œuvre, MTN ayant sollicité l’intervention de la Caisse de dépôts et consignations (CDEC) dans le cadre de cette procédure.
La législation camerounaise stipule que les dépôts, consignations et séquestres judiciaires ne peuvent être ordonnés qu’au profit de la CDEC, qui détient un monopole en la matière. MTN a donc argumenté que la saisie ordonnée par le TPI était illégale, car elle contournait cette disposition légale.
Ainsi, cette affaire, riche en rebondissements et en enjeux financiers considérables, continue de captiver l’attention tant des médias que du grand public. Les prochains développements de ce feuilleton judiciaire s’annoncent tout aussi palpitants.
R.M.
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